Créée en 2021 en Seine-Maritime, La Belle Tech fait souffler un vent d’innovation responsable dans toute la Normandie et au-delà. À la tête de cette start-up, cinq passionnés, dont Loïc Pérochon, qui veulent démocratiser les low tech : ces technologies simples, robustes et accessibles, pour un modèle de société plus durable.

L’équipe de la startup normande La Belle Tech partage des valeurs fortes, issues de parcours de vie très différents. C’est le cas de Loïc Pérochon, ingénieur de formation et chef de projet, qui participe en 2015 à la construction d’aéroports en Arabie Saoudite. « Là-bas, j’ai vu des gens réduits à l’esclavage moderne dont j’étais malgré moi complice en tant que donneur d’ordre. Cela m’a profondément marqué. Je ne pouvais pas continuer à travailler contre mes valeurs », raconte-t-il.

Loic Perochon la belle tech

De retour en Normandie en 2017, Loïc recentre ses activités sur l’accompagnement industriel et les systèmes de management pour les PME. Plus récemment, il se forme à l’écoconception avec l’Ademe.
Il retrouve également un ami, Arnaud Crétot, rencontré lors de ses études à Rouen. Fondateur de l’association Les Vagabonds de l’Énergie, l’ingénieur thermicien travaille sur le projet d’une boulangerie artisanale solaire (NeoLoco). « Il avait besoin d’un four suffisamment grand et robuste, alors je l’ai mis en relation avec un de mes clients, une entreprise de chaudronnerie, CPM Industries, près du Havre ». L’équipement voit le jour en 2020, en pleine pandémie. « Ensemble, nous venions de professionnaliser une première low-tech. » L’équipe se met ainsi en tête d’en diffuser d’autres en créant La Belle Tech en 2021.

« Réinventer nos modes de production et de consommation »

« Au cours des 50 dernières années, l’économie française a connu une transformation majeure. Les travaux manuels ont été automatisés ou délocalisés à des milliers de kilomètres, ce qui a entraîné une disparition progressive des métiers liés à l’industrie, l’agriculture et l’artisanat. Ces changements engendrent une forte consommation de ressources et accentuent la vulnérabilité des systèmes socioéconomiques face aux crises », alerte Loïc Perochon.

Chez La Belle Tech, nous voulons être acteurs d’une révolution industrielle et artisanale, portée par les principes de la low-tech, pour réinventer nos modes de production et de consommation. Notre objectif est de transformer l’industrie locale pour qu’elle soit non seulement résiliente face aux crises, vecteur de progrès social, mais également économe en ressources. 

Concrètement, la start-up normande s’est fixée pour objectif de diffuser en open source des outils simples, robustes, réparables et surtout peu énergivores. Puis de les mettre à disposition des entreprises ou des collectivités « pour les aider à mettre en place de nouveaux modèles socio-économiques viables et durables », explique Loïc Perochon.

Plusieurs projets déjà développés

Les vertus du biochar

Le projet BIOCHAR en constitue le parfait exemple. « Nous avions identifié un potentiel intéressant autour du biochar, ce charbon végétal issu de déchets organiques ». Utilisé comme amendement pour les sols, il améliore leur fertilité, réduit l’utilisation d’engrais chimiques et contribue à capter du carbone. Le projet s’est concrétisé grâce à la rencontre avec les équipes de l’ESAT Le Pré de la Bataille à Rouen. « Au fil de nos discussions, j’ai appris que la mise en déchèterie de leurs déchets verts leur coûtait plusieurs dizaines de milliers d’euros par an. Je leur ai proposé de transformer eux-mêmes ces déchets en un produit naturel qu’ils pourraient utiliser et vendre ». Pour cela, il fallait un pyrolyseur. « Nous sommes en train d’en concevoir un, mais en attendant, nous utilisons un modèle anglais en location », précise Loïc Perochon. Les travailleurs de l’ESAT ont réalisé leur première production en août 2024. « En 2025, l’objectif est de produire 300 kg de biochar par semaine. »

Pour envisager cette montée en puissance, La Belle Tech et l’ESAT ont identifié plusieurs sources d’intrants locaux : les tailles de pommiers à cidre, les déchets d’élagage des services d’entretien des routes du Département… « Nous travaillons également avec la société Grosdoit spécialisée dans la distribution de produits carnés pour transformer certains os en bonechar. »


L’objectif est de répliquer ce modèle vertueux, sur les plans social, économique et environnemental, avec d’autres ESAT sur différents territoires. Ce projet, lauréat d’un appel à projets de l’Ademe, bénéficie d’une aide de 100 000 € pour la conception technique d’un pyrolyseur open source, et pour l’évaluation environnementale associée.

Le Mushu : la cuisson low-tech pour les professionnels

Parmi les autres projets développés par La Belle Tech, le Mushu est un rocket stove professionnel : une alternative ingénieuse et écoresponsable aux brûleurs à gaz traditionnels pour les activités de cuisson alimentaire. Son atout principal réside dans sa chambre de combustion innovante, qui optimise l’efficacité énergétique tout en réduisant les émissions de fumée. Avec une consommation de bois réduite jusqu’à 30 % par rapport aux cuisinières classiques, le Mushu permet de cuisiner 20 kg de frites avec moins de 20 kg de bois de palette ! La Belle Tech accompagne les professionnels dans la prise en main de l’outil pour une efficacité optimale.

rocket-stove-la belle tech

Le Vhélio : l’alternative solaire et low-tech à la voiture

Vhelio la belle tech

Développé en open-source en partenariat avec l’association VSPT, grâce à une communauté de bénévoles engagés, le Vhélio est un véhicule intermédiaire, propulsé par énergie solaire et musculaire. À la fois léger, robuste et modulable, il s’adapte aux besoins des professionnels comme aux familles, en pouvant transporter jusqu’à 200 kg.


Avec une masse 15 fois inférieure à celle d’une voiture classique, il est idéal pour les trajets urbains et périurbains. Son design innovant, qui inclut une galerie solaire et des équipements de visibilité, le rend sûr, pratique et conforme aux pistes cyclables. Compact, il est également facile à stationner.

Un partenariat avec l’École des Mines de Paris

La Belle Tech explore désormais d’autres pistes autour d’objets low tech au service des professionnels. La start-up a également signé un partenariat avec un laboratoire de l’École des Mines de Paris qui travaille sur le management de l’innovation face à l’inconnu. Si La Belle Tech a fait de la Normandie son terrain de jeu, son rayonnement dépasse déjà les frontières régionales. Et ce n’est qu’un début…

En savoir plus sur labelletech.fr

À lire

Le modèle de La Belle Tech est une alternative pour répondre aux enjeux de notre époque, dont parle Ressources, une bande dessinée du grand promoteur des low tech Philippe Bihouix qui questionne notre gestion des matières premières et plaide pour davantage de sobriété.

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