Bioeconomy for change (B4C) est devenu, en quelques années, le réseau de référence de la bioéconomie en France, en Europe et à l’international. Leur cœur de métier ? Accompagner les projets d’innovation et d’industrialisation de leurs adhérents dans la valorisation de la biomasse. Partenaire de la Région depuis 2021, le pôle de compétitivité s’appuie sur les multiples ressources du territoire pour mener à bien la stratégie régionale lancée en 2023. Rencontre avec Claire Charlier, déléguée régionale Normandie, ancienne ingénieure dans l’industrie, aujourd’hui installée à Caen pour Bioeconomy for change.
Qu’est-ce que la bioéconomie, concrètement ?
C’est l’ensemble des activités de production et de transformation de la biomasse, qu’elle soit d’origine agricole, forestière ou aquacole, et pour des fins alimentaires (humaine ou animale), de chimie biosourcée, de matériaux biosourcés, ou d’énergie.
En créant de la valeur ajoutée, elle permet de répondre au défi climatique, réduire notre empreinte carbone, retrouver nos souverainetés, et renforcer la compétitivité de nos entreprises. C’est aussi beaucoup d’opportunités de croissance et de création d’emplois difficilement délocalisables. Cela permet de renforcer la compétitivité de la France en revitalisant les zones rurales en particulier, en lien avec les zones industrielles puisque l’idée, c’est que ces innovations soient, à terme, industrialisables, pour devenir des solutions à grande échelle.
La bioéconomie est l’une des solutions pour substituer les ressources fossiles, son économie est basée sur le vivant, la biomasse, c’est-à-dire l’utilisation de ressources renouvelables.
A qui vous adressez-vous ?
Tous les professionnels qui ont un intérêt pour la biomasse et le biosourcé peuvent solliciter une adhésion. 50% de nos membres – environ 250 – sont des PME/TPE, voire des start-ups. Nous avons 20% en moyenne de gros groupes ou ETI, qui valorisent la biomasse ou qui sont en recherche de solutions biosourcées. Par exemple, nous avons des acteurs de la chimie qui souhaitent trouver des substitutions au pétro-sourcé. Le reste de nos adhérents peut regrouper des laboratoires de recherche, des centres de transfert, des universités, des écoles privées, des coopératives agricoles, des institutions, des organismes financiers… En bref, tout l’écosystème qui permet de faciliter les choses quand on parle d’industrialisation ancrée sur le territoire.
Que représente B4C sur le territoire normand ?
On compte aujourd’hui une soixantaine de membres en Normandie, avec environ 2/3 d’entreprises, 10% d’établissements d’enseignement et de recherche ainsi que des acteurs incontournables de l’écosystème : chambres d’agriculture, Haropa Port, Village by CA, etc. On travaille en lien étroit avec la Normandie depuis 2021 et avons organisé avec la Région les États généraux de la bioéconomie en mai 2022. Cela nous a permis de rassembler un bon nombre d’acteurs sur les différentes thématiques de la bioéconomie et de travailler avec eux pour ressortir leurs besoins. Et notamment à travers les filières normandes : les protéines végétales et nouvelles protéines comme les insectes ; la bioéconomie bleue (valorisation des bioressources aquatiques – déchets coquillers…), la fibre végétale et naturelle (pour les usages matériaux et textiles), ainsi que la chimie biosourcée et les bioénergies. Avec une série de partenaires normands spécialisés dans leur thématique, nous avons rédigé la stratégie régionale de la bioéconomie lancée en janvier 2023. B4C coordonne la stratégie avec la Chambre régionale d’agriculture de Normandie en plus de piloter certaines actions et travailler en partenariat sur d’autres.
Le territoire normand est déjà extrêmement riche en soi : il dispose de toutes les ressources dont on peut avoir besoin pour la bioéconomie.
Quelles actions mettez-vous en place dans le cadre de cette stratégie ?
Nous accompagnons stratégiquement les acteurs pour faire émerger des projets d’innovation et d’industrialisation dès l’initiation, avec la mise en relation qualifiée des potentiels partenaires, jusqu’à la labellisation, en fléchant les projets vers les financements les plus adaptés. Sur chaque filière identifiée, nous réalisons également des actions plus précises, pour les dynamiser et les aider à se structurer. Nous faisons un travail de veille sur tous les volets de la bioéconomie, y compris les financements publics, ce qui nous permet d’avoir une vision sur les dispositifs régionaux, les financements nationaux et européens.
Nous sensibilisons également les différents acteurs à travers l’organisation d’événements, d’ateliers pour favoriser les synergies.
Nous animons le portail de la bioéconomie, la vitrine régionale de la bioéconomie, sur lequel sont mis en avant les success stories et projets des acteurs du territoire, l’ agenda des événements autour de la bioéconomie et une cartographie des acteurs de la bioéconomie où l’on peut se référencer gratuitement. Mais également les différents dispositifs comme les appels à projets ainsi que des exemples, des infographies, des diagnostics territoriaux, la stratégie, l’actualité des acteurs – sur le territoire, cela se traduit par des choses palpables.
Justement, pouvez-vous donner quelques exemples d’acteurs innovants en bioéconomie ?
Il n’est pas évident de choisir parce qu’il y a beaucoup d’acteurs et d’innovation en Normandie ! Je peux citer Terre de Lin, à la fois producteur et transformateur, qui a réalisé un bateau en fibre de lin, We explore, parti faire la route du Rhum en 2023. C’est un bon exemple pour illustrer comment la matière produite en Normandie peut être valorisée afin de construire des moyens de mobilité biosourcés. On peut penser aussi à NaturePlast qui utilise tout type de coproduits organiques comme des déchets agricoles ou bien des coquilles d’huîtres broyées pour les incorporer dans des bioplastiques. Il y a aussi des groupes et des coopératives, comme Agrial et Natup qui sont à la pointe de l’innovation. Je pense aussi à Arkema avec le Cerdato, qui développe aussi des matériaux biosourcés, ou Algaia, qui fait des biostimulants à partir d’algues… Vous connaissez aussi Veragrow, qui fait du lombricompost optimisé, ou encore le laboratoire Dielen, qui valorise des coproduits de poissons pour en faire des compléments alimentaires nutraceutiques. Je pense aussi à Saipol (filiale du groupe Avril), qui a une raffinerie d’huile usagée, ou Olvéa, qui fait du raffinage d’huile.
Quelles sont les forces et les atouts de la Normandie pour l’économie décarbonée et la bioéconomie en général ?
Ici, ce qui est très intéressant c’est qu’il y a 3 atouts principaux :
- La biomasse. Une partie de la Normandie est rurale avec beaucoup de surfaces agricoles. C’est la première région productrice de fromages au lait de vache, de pommes à cidres et produits cidricoles, de lin, d’huîtres, de saumon d’élevage, de pêche de coquillages ; il y a une vraie diversité d’aquaculture, grâce à 640 km de côtes… Ce n’est pas anodin, c’est autant de biomasse que l’on peut imaginer valoriser.
- Le bassin industriel, notamment autour de l’axe Seine, avec de très grandes capacités et un réseau énergétique fort. L’avantage de ce bassin industriel, c’est sa position géographique stratégique avec des infrastructures portuaires qui facilitent l’importation de ce qui manque et l’exportation de notre production.
- Le nombre et la complémentarité des acteurs déjà présents en Normandie. Nous avons tous les éléments de la chaîne de valeur qui sont bien représentés : producteurs de biomasse, les transformateurs, et fabricants de produits finis; les universités et les centres techniques… Et les entreprises industrielles se retrouvent dans plusieurs secteurs applicatifs très variés : l’agroalimentaire, la chimie, les matériaux… Il y a des centres de recherche publics et privés qui sont à la pointe, une station marine, et des écoles comme Builders, L’ENSICaen, Polyvia, des universités à Caen, Rouen et Le Havre.
Il y a aussi tout un réseau de l’écosystème autour des pôles de compétitivité, assez varié : on retrouve Aquimer, Cosmetic Valley, des réseaux comme France Chimie Normandie, LSN sur la partie logistique, Nextmove, Valorial, Hippolia, Normandie AeroEspace, Normandie Maritime, etc… ; et puis des dynamiques autour de l’économie circulaire, avec NECI (Normandie Economie CIrculaire), des structures et des incubateurs comme l’AD Normandie, Normandie Incubation, la Chambre d’agriculture, le Village by CA, des investisseurs et financeurs, Normandie Participation, l’Ademe, la BPI…
Un dernier mot ?
La Normandie est déjà une terre de bioéconomie : nous sommes là pour catalyser l‘innovation pour optimiser les synergies et les développements entre tous les acteurs. N’hésitez pas à nous solliciter si vous souhaitez plus d’informations, afin que nous vous expliquions qui nous sommes.
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