La start-up créée par Sophie Perdriel développe un système de culture d’algues en bassins respectueux des ressources marines. Objectif : fournir localement les industries agroalimentaires et cosmétiques.
A 30 ans à peine, Sophie Perdriel a troqué le tailleur pour les bottes en caoutchouc. Après une carrière à l’international dans des cabinets de conseil en investissement, cette fille et petite-fille d’ostréiculteurs a décidé de rentrer dans sa Normandie natale pour y cultiver… des algues.
En cherchant une activité en lien avec la mer, j’ai constaté qu’il n’y avait pas d’algoculture dans notre région. J’y ai vu l’opportunité de créer une entreprise pionnière sur le territoire
L’algue, aliment du futur
Le secteur, lui, est très prometteur. Pauvre en calories mais riche en protéines, en fer et en iode, l’algue fait figure d’or vert dans un contexte alimentaire mondial de plus en plus incertain. Tandis que l’Europe a ajouté 20 nouvelles espèces d’algues à son catalogue Novel Food, la France a publié, début 2024, sa feuille de route nationale pour le développement de la filière algale française.
Les algues utilisées aujourd’hui en France par les transformateurs – industries agroalimentaires et cosmétiques en tête – sont principalement importées depuis le Japon, la Corée ou la Malaisie. Des pays qui pratiquent une culture intensive, destructrice pour les ressources marines. “ Un modèle qui porte atteinte à la biodiversité et qui n’est plus soutenable aujourd’hui, estime la jeune femme. Il est d’autant plus absurde d’importer des algues du bout du monde alors que c’est une ressource que l’on peut produire chez nous.”
Un système d’algoculture innovant et durable
Avec sa start-up MAGMA – pour Macro AlGae Made with Amour -, lancée fin 2023, Sophie Perdriel ambitionne de développer un système d’algoculture innovant et respectueux de l’environnement.
Le milieu naturel sera prélevé en très faible quantité pour créer des plantules, c’est-à-dire des bébés algues, qui seront cultivées dans des bassins situés à terre. En plus d’être plus durable, ce modèle garantit une culture de meilleure qualité et plus régulière, grâce à la maîtrise des paramètres de production
Un système d’algoculture qui pourra s’adapter à des bassins existants. Il offrira ainsi aux conchyliculteurs une opportunité de diversification économique pendant les périodes creuses. Les transformateurs, qui peinent aujourd’hui à s’approvisionner, accèderont eux à une ressource française, en l’occurrence normande. ” A terme, j’ambitionne aussi de développer ma propre gamme de produits agroalimentaires à base d’algues “, souligne l’entrepreneure.
Lancement de la production en 2026
Après un passage par Normandie Incubation, MAGMA débute sa phase pilote, grâce à une aide financière de la Région Normandie, au sein de l’institut de recherche du SMEL à Blainville-sur-Mer. “ Cette nouvelle phase de R&D doit nous permettre de mettre au point des processus de production espèces par espèces, avec tous les paramètres à contrôler ”.
Objectif : lancer la production – d’abord de laitue de mer (Ulva lactuca) – à l’horizon 2026. “ Je cherche aujourd’hui du foncier sur le littoral, dans le Bessin, pour y installer une première ferme algocole ”, explique Sophie Perdriel qui a, en parallèle, repris un cursus de formation avec des stages en cultures marines.
La “filière algues” normande est née
“ Le projet de MAGMA est soutenu localement, par la Région, le département du Calvados, le SMEL ou encore la Section régionale de conchyliculture Normandie-Mer du nord ainsi que des industriels normands.”
Tout cet écosystème est très structuré et tous ses acteurs travaillent ensemble dans le même objectif : que les gens qui, en Normandie, ont des idées, puissent les concrétiser.
Parallèlement, MAGMA s’est fédéré avec différents acteurs publics et privés pour structurer localement la production et la transformation d’algues – notamment des espèces invasives. La NFA (Normandie Filière Algues) a été officiellement créée le 13 mai 2024.
Thématiques